Réforme judiciaire : une menace pour l’indépendance de la Cour suprême de justice ?

La réforme du système judiciaire mexicain, qui prévoit l'élection populaire des juges, des magistrats et des juges de paix, a suscité un vif débat sur l'indépendance de la justice et la séparation des pouvoirs. Si ses partisans la défendent comme une avancée démocratique, ses détracteurs mettent en garde contre une possible politisation du système judiciaire.
La réforme judiciaire au Mexique, approuvée par le Sénat début septembre 2024, est au cœur de l'agenda politique national, avec notamment la récente élection populaire des juges, magistrats et juges. Cette réforme prévoit des changements importants dans la structure de la Cour suprême de justice de la nation (SCJN), notamment la réduction du nombre de juges de 11 à 9 et la réduction de leur mandat de 15 à 12 ans. Par ailleurs, les deux chambres de la Cour ont été supprimées, et celle-ci siégera désormais uniquement en séance plénière et en public.
L'élection des ministres du SCJN, des juges du Tribunal électoral et des juges du Tribunal disciplinaire se déroulera au niveau national, parmi 30 candidats égaux proposés par les trois pouvoirs du gouvernement.
Les 1 633 juges de circuit et de district seront élus dans chacun des 32 circuits judiciaires, avec six candidats égaux par poste (deux de chaque branche de l'Union). La première phase de cette élection a eu lieu le 1er juin 2025, avec l'élection de plus de 2 600 juges.
Malgré l'intention de démocratiser le système judiciaire, le processus a fait l'objet de vives critiques. L'opposition, notamment le PRI et le PAN, a qualifié l'élection de « farce » et a annoncé son intention de demander son annulation. Elle affirme que le gouvernement fédéral a participé ouvertement au processus et qu'un grand nombre de votes nuls ont été enregistrés. De plus, l'utilisation d'« accordéons », ou tracts contenant des listes de candidats affiliés au parti Morena au pouvoir, pour inciter au vote, une pratique considérée comme un délit électoral, a été signalée.
Le débat central autour de cette réforme porte sur son impact sur l'indépendance du pouvoir judiciaire. Des critiques, comme l'ancien président Ernesto Zedillo, ont averti que l'élection populaire des juges pourrait « politiser l'administration de la justice et soumettre la Cour aux intérêts d'un seul parti », ce qui aurait des conséquences importantes pour l'indépendance de la justice et créerait un précédent inquiétant pour la démocratie en Amérique latine.
« Les élections judiciaires de 2025 n'ont pas constitué une avancée démocratique, mais plutôt un profond revers institutionnel. Le pouvoir judiciaire a été livré aux caprices des urnes, sans aucune garantie d'intégrité, de compétence ou d'impartialité. »
On craint que ce processus ne transforme les tribunaux en organes politisés, plus sensibles à la popularité des candidats et à des facteurs externes, ce qui affaiblirait les freins et contrepoids démocratiques et créerait un précédent inquiétant pour la démocratie en Amérique latine.
D'autre part, les partisans de la réforme, comme Claudia Sheinbaum, soutiennent que l'élection populaire des juges est une étape nécessaire pour démocratiser la justice, lutter contre la corruption et rendre le système judiciaire plus rapide et accessible au public. La réforme établit également de nouvelles règles procédurales, telles que l'interdiction d'accorder des suspensions d'application de lois à effet général dans les procédures d'amparo et la fixation de délais maximaux pour le règlement des affaires fiscales et pénales.
La faible participation citoyenne, estimée entre 12 % et 13,3 % des listes électorales, complexifie le débat sur la légitimité de cette transformation institutionnelle. Le débat sur la réforme judiciaire au Mexique se poursuit, avec des implications importantes pour l'avenir de ses institutions démocratiques et de l'État de droit.
La Verdad Yucatán