La croisière Dior était un hommage envoûtant à la scène

Une mécène extravagante, un théâtre sacré et une soirée mystérieuse de « tableaux vivants » : tels sont les esprits que Maria Grazia Chiuri a cherché à retrouver dans la collection Dior croisière 2026 et son court métrage d'accompagnement, Les Fantômes du Cinéma .

Pour comprendre ces renaissances fantomatiques, il faut remonter au temps. La collection s'inspire fortement de la vie et du luxe de la comtesse Anna Laetitia Pecci, plus connue sous le nom de Mimì Pecci-Blunt, cliente assidue de la haute couture et mécène des arts jusqu'à sa mort en 1971. Dans son salon parisien et son hôtel particulier romain, Pecci-Blunt recevait souvent des artistes tels que Salvador Dalí, l'écrivain Alberto Moravia, le compositeur Henri Sauguet, et bien d'autres.

Sur le podium du défilé Dior croisière 2026.

Sur le podium du défilé Dior croisière 2026.

En 1958, la comtesse acheta et dirigea le Teatro della Cometa à Rome pour une saison glorieuse. Si le théâtre changea de mains au fil des ans avant de sombrer dans l'oubli, Dior le reprit en 2020, laissant sa restauration entre les mains de Chiuri. Cinq ans plus tard, à l'approche de la réouverture du lieu, Chiuri se rendit à la Villa Albani Torlonia pour raviver la vision de Pecci-Blunt à travers un défilé aux multiples facettes. La collection et le film font directement référence à l'une des soirées glamour de la comtesse à Paris en 1930 : le Bal Blanc, où les invités, vêtus de blanc, se transformèrent en sculptures d'albâtre, faisant office de « tableaux vivants » du lieu (comme en témoignent les ensembles entièrement blancs et les trompe-l'œil scintillants d'inspiration romaine du défilé).

Le résultat est une scène d'une beauté d'une fragilité extrême. En faisant revivre ces fantômes à la mode, un sentiment de temporalité demeure. Pour Chiuri, c'est voulu. La directrice artistique a travaillé en étroite collaboration avec la maison de costumes italienne Tirelli pour reproduire fidèlement les pièces des archives de la costumière, en utilisant de la dentelle d'époque, comme on le voit sur les acteurs au visage poudré qui défilent dans le film. Comme Chiuri l'a expliqué sur Instagram, un seul accroc sur un rosier manucuré suffirait à faire s'effondrer la robe crinoline du personnage.

Sur le podium du défilé Dior croisière 2026.

Sur le podium du défilé Dior croisière 2026.

Sur le podium, les mannequins, vêtus de blanc, de noir et de beige, défilaient sur le chemin pavé de galets, vêtus de jupes transparentes et ondoyantes, de vestes de smoking et de robes fourreau minimalistes. La collection était non seulement un hommage à l'héritage de Pecci-Blunt et Tirelli, mais aussi un aboutissement nostalgique de près d'une décennie de créations délicates de Chiuri. Un lien intéressant entre la mode féminine et Dior Homme se dessinait également. Nombre d'entre eux arboraient des masques en dentelle, autre référence directe au code vestimentaire de Bal Blanc, qui ajoutait indéniablement à l'allure et méritait une chaleureuse ovation. Cependant, impossible de ne pas évoquer les saisissants masques en satin de la dernière collection de Kim Jones pour la marque, présentée lors de la saison automne 2025.

En définitive, Chiuri demeure une mécène passionnée, attachée à l'élaboration d'un récit vestimentaire jusque dans les moindres détails de la féminité. À l'instar des invitées du Bal Blanc de Pecci-Blunt et des créations de Tirelli au cinéma, Chiuri excelle à donner vie à la vision d'un personnage.