Exposition aux pesticides: une plateforme lancée pour informer sur les risques et interpeller le gouvernement
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Sommes-nous "tous exposés"? Plusieurs organismes ont lancé ce lundi 24 février une plateforme interactive en ligne nommée "Tous exposés" ayant pour objectif de "mesurer et comprendre l'exposition aux pesticides chimiques".
"Ce qui commence dans les champs, impacte le vivant et finit dans nos assiettes", peut-on ainsi lire sur la page d'accueil du site.
Quatre associations environnementales, "Générations Futures", "Secrets Toxiques", "Noé" et "On est Prêt", se sont alliées à des acteurs économiques de la filière biologique comme "La Maison de la Bio", ainsi qu'à des mutuelles pour lancer cette plateforme.
Les organismes veulent montrer l'impact des pesticides sur les agriculteurs et les riverains, sur les écosystèmes ainsi que sur notre eau et notre alimentation.
Pour cela, la plateforme propose deux cartes interactives. La première, appelée Adonis, permet de visualiser l'utilisation des pesticides chimiques par commune. Développée grâce aux données de l'association Solagro, elle montre un usage important de ces produits phytosanitaires notamment dans le nord de la France et dans le grand bassin parisien ainsi que dans la région bordelaise et près de la Méditerranée.
La seconde carte Géophyto, développée par Générations Futures, permet de visualiser quels pesticides sont les plus achetés par département et leurs impacts sur la santé ou sur l'environnement.
Selon la plateforme, avec 68.539 tonnes vendues en 2022, la France est le premier marché de pesticides en Europe, devant l'Espagne (56.353 tonnes) et l'Allemagne (48.169 tonnes).
"Elle monte également sur la troisième marche du podium du nombre de substances pesticides, avec 291 substances autorisées en France en février 2023, contre une moyenne de 220 en Europe, se classant ainsi juste derrière la Grèce et l'Espagne", peut-on également lire.
La plateforme "Tous exposés" a également pour objectif d'interpeller les pouvoirs publics sur la question des pesticides et de dénoncer les "régressions" des politiques publiques à ce sujet. Ainsi, il est directement possible sur le site d'interpeller le ministre de la Santé Yannick Neuder et son cabinet.
"On propose d'envoyer un email en un clic qui demande à Yannick Neuder d'inscrire dans la loi la non-exposition aux pesticides chimiques parce que c'est la santé de tout le monde qui est en jeu, à commencer par nos agriculteurs", explique auprès de France Inter Magali Payen, du mouvement "On est prêt".
Les organismes invitent également le gouvernement à "inscrire durablement la non-exposition aux pesticides dans les futures stratégies nationales sur l'alimentation (...) et à inscrire dans la loi un objectif de 12% de consommation de produits issus de l'agriculture biologique en 2030".
En France, la loi Egalim fixe l'objectif d'atteindre au moins 50% de produits de qualité et durables, dont au moins 20% de produits biologiques dans la restauration collective. Des chiffres qui ne sont pas encore atteints.
"Depuis 30 ans, il existe une alimentation sans pesticides de synthèse et engrais chimiques qui s'appelle l'agriculture et l'alimentation bio, ça représente entre 5% et 6% de l'alimentaire et ça constitue une solution simple pour minimiser notre exposition aux pesticides dans l'alimentation", affirme à France Inter Christophe Barnouin de "La Maison de la Bio".
Des résidus de pesticides sont régulièrement retrouvés dans nos aliments ou dans l'eau que nous buvons. En mai, Le Monde révélait que 97% des eaux souterraines françaises étaient contaminées par un ou plusieurs pesticides, ou par des produits de dégradation de ces substances, les métabolites.
Des liens ont été établis entre l'exposition aux pesticides et certaines maladies comme les lymphomes non hodgkiniens (LNH), le myélome multiple, le cancer ou la maladie de Parkinson. Récemment par exemple, la justice a reconnu un lien entre la mort d'une jeune enfant et le métier de fleuriste de sa mère, à cause de l'exposition aux pesticides lorsqu'elle était enceinte.
La loi d'orientation agricole a été définitivement adoptée au Parlement ce jeudi. Une mesure inquiète la gauche et les écologistes: celle qui invite le gouvernement à "s'abstenir d'interdire les usages de produits phytopharmaceutiques autorisés par l'Union européenne" en l'absence d'alternatives viables.
Une proposition de loi a également été votée fin janvier au Sénat afin notamment de lever l'interdiction de certains pesticides néonicotinoïdes, nocifs pour les abeilles.
BFM TV